Mais l'Eglise estime de son devoir de rappeler toujours la dignité et les droits des travailleurs, de stigmatiser les conditions dans lesquelles ils sont violés, et de contribuer pour sa part à orienter ces changements vers un authentique progrès de l'homme et de la société |
L'analyse complète de la situation du monde d'aujourd'hui a mis en évidence de manière encore plus profonde et plus pleine la signification de l'analyse antérieure des injustices sociales, signification qui doit être aujourd'hui donnée aux efforts tendant à établir la justice sur la terre, sans pour autant cacher les structures injustes mais en sollicitant au contraire leur examen et leur transformation à une échelle plus universelle. |
le travail humain est une clé, et probablement la clé essentielle, de toute la question sociale, si nous essayons de la voir vraiment du point de vue du bien de l'homme |
C'est un fait, par ailleurs, qu'en certains cas, cette alliée qu'est la technique peut aussi se transformer en quasi adversaire de l'homme, par exemple lorsque la mécanisation du travail «supplante» l'homme en lui ôtant toute satisfaction personnelle, et toute incitation à la créativité et à la responsabilité, lorsqu'elle supprime l'emploi de nombreux travailleurs ou lorsque, par l'exaltation de la machine, elle réduit l'homme à en être l'esclave. |
C'est en tant que personne que l'homme est sujet du travail. C'est en tant que personne qu'il travaille, qu'il accomplit diverses actions appartenant au processus du travail; et ces actions, indépendamment de leur contenu objectif, doivent toutes servir à la réalisation de son humanité, à l'accomplissement de la vocation qui lui est propre en raison de son humanité même: celle d'être une personne. |
Il n'y a en effet aucun doute que le travail humain a une valeur éthique qui, sans moyen terme, reste directement liée au fait que celui qui l'exécute est une personne, un sujet conscient et libre, c'est-à-dire un sujet qui décide de lui-même. |
le fondement permettant de déterminer la valeur du travail humain n'est pas avant tout le genre de travail que l'on accomplit mais le fait que celui qui l'exécute est une personne. Les sources de la dignité du travail doivent être cherchées surtout, non pas dans sa dimension objective mais dans sa dimension subjective. |
le travail est avant tout «pour l'homme» et non l'homme «pour le travail» |
indépendamment du travail que tout homme accomplit, et en supposant qu'il constitue un but _ parfois fort absorbant _ de son activité, ce but ne possède pas par lui-même une signification définitive. |
A l'époque moderne, dès le début de l'ère industrielle, la vérité chrétienne sur le travail devait s'opposer aux divers courants de la penséematérialiste et «économiste». |
Malgré cela, le danger de traiter le travail comme une «marchandise sui generis», ou comme une «force» anonyme nécessaire à la production (on parle même de «force-travail»), existe toujours, lorsque la manière d'aborder les problèmes économiques est caractérisée par les principes de l'«économisme» matérialiste. |
il convient de reconnaître que l'erreur du capitalisme primitif peut se répéter partout où l'homme est en quelque sorte traité de la même façon que l'ensemble des moyens matériels de production, comme un instrument et non selon la vraie dignité de son travail, c'est-à-dire comme sujet et auteur, et par là même comme véritable but de tout le Processus de production. |
L'appel à la solidarité et à l'action commune, lancé aux hommes du travail, avait sa valeur, une valeur importante, et sa force persuasive, du point de vue de l'éthique sociale, surtout lorsqu'il s'agissait du travail sectoriel, monotone, dépersonnalisant dans les complexes industriels, quand la machine avait tendance à dominer sur l'homme. |
On sait aussi que, de bien des façons, il est possible de se servir du travail contre l'homme, qu'on peut punir l'homme par le système du travail forcé dans les camps de concentration, qu'on peut faire du travail un moyen d'oppression de l'homme, qu'enfin on peut, de différentes façons, exploiter le travail humain, c'est-à-dire le travailleur. Tout ceci plaide pour l'obligation morale d'unir l'ardeur au travail comme vertu à un ordre social du travail, qui permette à l'homme de «devenir plus homme» dans le travail, et lui évite de s'y dégrader en usant ses forces physiques (ce qui est inévitable, au moins jusqu'à un certain point), et surtout en entamant la dignité et la subjectivité qui lui sont propres. |
Le travail est, d'une certaine manière, la condition qui rend possible la fondation d'une famille, |
on doit se souvenir et affirmer que la famille constitue l'un des termes de référence les plus inmportants, selon lesquels doit se former l'ordre social et éthique du travail humain. |
... on doit avant tout rappeler un principe toujours enseigné par l'Eglise. C'est le principe de la priorité du «travail» par rapport au «capital». |
Il faut souligner et mettre en relief le primat de l'homme dans le processus de production, le primat de l'homme par rapport aux choses. Tout ce qui est contenu dans le concept de «capital», au sens restreint du terme, est seulement un ensemble de choses. |
Tout en travaillant, l'homme «hérite du travail d'autrui» |
... il y avait l'erreur fondamentale que l'on peut appeler l'erreur de l'«économisme» et qui consiste à considérer le travail humain exclusivement sous le rapport de sa finalité économique. |
le droit à la propriété privée est subordonné à celui de l'usage commun, à la destination universelle des biens. |
De ce point de vue, demeure inacceptable la position du capitalisme «rigide», qui défend le droit exclusif de la propriété privée des moyens de production, comme un «dogme» intangible de la vie économique. Le principe du respect du travail exige que ce droit soit soumis à une révision constructive, tant en théorie qu'en pratique. S'il est vrai que le capital_ entendu comme l'ensemble des moyens de production _ est en même temps le produit du travail des générations, il est alors tout aussi vrai qu'il se crée sans cesse grâce au travail effectué avec l'aide de cet ensemble de moyens de production, qui apparaissent comme un grand atelier où oeuvre, jour après jour, l'actuelle génération des travailleurs. Il s'agit, à l'évidence, des diverses sortes de travail, non seulement du travail dit manuel, mais aussi des divers travaux intellectuels, depuis le travail de conception jusqu'à celui de direction. |
Ainsi
donc, le fait que les moyens de production deviennent la
propriété de l'Etat dans le système collectiviste
ne signifie pas par lui-même que cette propriété
est «socialisée». On
ne peut parler de socialisation que si la subjectivité de la
société est assurée, c'est-à-dire si
chacun, du fait de son travail, a un titre plénier à se
considérer en même temps comme co-propriétaire du
grand chantier de travail dans lequel il s'engage avec tous |
Lorsque l'homme travaille, en utilisant l'ensemble des moyens de production, il désire en même temps que les fruits de son travail soient utiles, à lui et à autrui, et que, dans le processus même du travail, il puisse apparaître comme co-responsable et co-artisan au poste de travail qu'il occupe. |
... l'homme qui travaille désire non seulement recevoir la rémunération qui lui est due pour
son travail, mais aussi qu'on prenne en considération, dans le
processus même de production, la possibilité pour lui
d'avoir conscience que, même s'il travaille dans une propriété collective, il travaille en même temps «à son compte». Cette
conscience se trouve étouffée en lui dans un
système de centralisation bureaucratique excessive où le
travailleur se perçoit davantage comme l'engrenage d'un grand
mécanisme dirigé d'en haut et _ à plus d'un titre
_ comme un simple instrument de production que comme un
véritable sujet du travail, doué d'initiative propre. L'enseignement de l'Eglise a toujours exprimé la conviction ferme et profonde que le travail humain ne concerne pas seulement l'économie, mais implique aussi et avant tout des valeurs personnelles. |
On doit tout faire pour que l'homme puisse conserver même dans un tel système la conscience de travailler «à son compte». Dans le cas contraire, il s'ensuit nécessairement dans tout le processus économique des dommages incalculables, dommages qui ne sont pas seulement économiques mais qui atteignent avant tout l'homme. |
Les droits humains qui découlent du travail rentrent précisément dans l'ensemble plus large des droits fondamentaux de la personne. |
... Tout cela constitue l'obligation morale du travail entendue en son sens le plus large. |
Lorsqu'il s'agit d'instaurer unepolitique du travail correcte du point de vue éthique, il est nécessaire d'avoir tous ces conditionnements devant les yeux. Et cette politique est correcte lorsque les droits objectifs du travailleur sont pleinement respectés. |
c'est précisément la prise en considération des droits objectifs du travailleur, quel qu'en soit le type: travailleur manuel, intellectuel, industriel ou agricole, etc., qui doit constituer le critère adéquat et fondamental de la formation de toute l'économie, aussi bien à l'échelle de chaque société ou de chaque Etat qu'à celui de l'ensemble de la politique économique mondiale ainsi que des systèmes et des rapports internationaux qui en dérivent. |
Le rôle des instances dont on parle ici sous le nom d'employeur indirect est d'agir contre le chômage, qui est toujours un mal et, lorsqu'il en arrive à certaines dimensions, peut devenir une véritable calamité sociale. Il devient un problème particulièrement douloureux lorsque sont frappés principalement les jeunes qui, après s'être préparés par une formation culturelle, technique et professionnelle appropriée, ne réussissent pas à trouver un emploi et, avec une grande peine, voient frustrées leur volonté sincère de travailler et leur disponibilité à assumer leur propre responsabilité dans le développement économique et social de la communauté. |
... il est indispensable que le critère de ces traités et de ces accords devienne toujours davantage le travail humain, compris comme un droit fondamental de tous les hommes, le travail qui donne à tous des droits analogues de telle sorte que le niveau de vie des travailleurs dans les diverses sociétés soit de moins en moins marqué par ces différences choquantes qui, dans leur injustice, sont susceptibles de provoquer de violentes réactions. Les Organisations internationales ont des tâches immenses à accomplir dans ce secteur. Il est nécessaire qu'elles se laissent guider par une évaluation exacte de la complexité des situations ainsi que des conditionnements naturels, historiques, sociaux, etc.; |
Une juste rémunération du travail de l'adulte chargé de famille est celle qui sera suffisante pour fonder et faire vivre dignement sa famille et pour en assurer l'avenir. |
L'expérience confirme qu'il est nécessaire de s'employer en faveur de la revalorisation sociale des fonctions maternelles, du labeur qui y est lié, et du besoin que les enfants ont de soins, d'amour et d'affection pour être capables de devenir des personnes responsables, moralement et religieusement adultes, psychologiquement équilibrées. Ce sera l'honneur de la société d'assurer à la mère _ sans faire obstacle à sa liberté, sans discrimination psychologique ou pratique, sans qu'elle soit pénalisée par rapport aux autres femmes _ la possibilité d'élever ses enfants et de se consacrer à leur éducation selon les différents besoins de leur âge. |
... on doit souligner que, d'une façon plus générale, il est nécessaire d'organiser et d'adapter tout le processus du travail de manière à respecter les exigences de la personne et ses formes de vie, et avant tout de sa vie de famille, en tenant compte de l'âge et du sexe de chacun. |
Un autre secteur qui concerne les prestations est celui du droit au repos: il s'agit avant tout ici du repos hebdomadaire régulier, comprenant au moins le dimanche, et en outre d'un repos plus long, ce qu'on appelle le congé annuel, ou éventuellement le congé pris en plusieurs fois au cours de l'année en périodes plus courtes. Enfin, il s'agit ici du droit à la retraite, à l'assurance vieillesse et à l'assurance pour les accidents du travail. |
La doctrine sociale catholique ne pense pas que les syndicats soient seulement le reflet d'une structure «de classe» de la société; elle ne pense pas qu'ils soient les porte-parole d'une lutte de classe qui gouvernerait inévitablement la vie sociale. Certes, ils sont les porte-parole de la lutte pour la justice sociale, pour les justes droits des travailleurs selon leurs diverses professions. Cependant, cette «lutte» doit être comprise comme un engagement normal «en vue» du juste bien: ici, du bien qui correspond aux besoins et aux mérites des travailleurs associés selon leurs professions; mais elle n'est pas une «lutte contre» les autres. |
La
caractéristique du travail est avant tout d'unir les hommes et
c'est en cela que consiste sa force sociale: la force de construire une
communauté. On
doit toujours souhaiter que, grâce à l'action de ses
syndicats, le travailleur non seulement puisse «avoir»
plus, mais aussi et surtout puisse «être» davantage,
c'est-à-dire qu'il puisse réaliser plus pleinement son
humanité sous tous ses aspects. |
L'émigration pour motif de travail ne peut d'aucune manière devenir une occasion d'exploitation financière ou sociale |
Il faut répéter encore une fois le principe fondamental: la hiérarchie des valeurs, le sens profond du travail exigent que le capital soit au service du travail et non le travail au service du capital. |
Mais plus grandit le pouvoir de l'homme, plus s'élargit le champ de ses responsabilités, personnelles et communautaires... Le message chrétien ne détourne pas les hommes de la construction du monde et ne les incite pas à se désintéresser du sort de leurs semblables: il leur en fait au contraire un devoir plus pressant» |
... Même si nous ne trouvons pas dans les paroles du Christ l'ordre particulier de travailler _ mais bien plutôt, une fois, l'interdiction de se préoccuper de manière excessive du travail et des moyens de vivre ... |
Cette croissance, si elle est bien comprise, est d'un tout autre prix que l'accumulation de richesses extérieures... |