Cette page voudrait aborder un sujet qui risque de paraître un tantinet abstrait et austère à certains qui ne jurent que par le pragmatisme ...
C'est pourtant des réalités bien concrètes qui m'incitent à me questionner sur certains fondements de la Politique ...
Je commencerai donc par un clin d'œil à Gavroche, notre ancêtre des titi parisiens qui, juste avant d'expirer, chantait les quelques couplets suivants :
(
voir : Victor Hugo , Les Misérables, Tome V, Livre premier,
Chapitre XV : « Gavroche dehors »
)
http://fr.wikisource.org/wiki/Les_Mis%C3%A9rables_TV_L1
;-)
« On est laid à Nanterre, C’est la faute
à Voltaire, |
Je ne suis pas notaire, |
Joie est mon
caractère, |
Je
suis tombé par terre, C’est la faute à Voltaire, Le nez dans le ruisseau, C’est la faute à… » |
Vous aurez compris que cela
n'était qu'un artifice pour
évoquer Jean-Jacques
Rousseau ... et ses
écrits qui redeviennent
périodiquement d'actualité. Pour introduire mon
propos, permettez-moi d'insérer ici quelques citations
concordantes de son 'petit traité' : «
Du
contrat social
».
Je vous
propose donc de lire d'abord ces quelques extraits en pensant aux
conditions de l'établissement d'une constitution ...
Chapitre 1.4 De l’esclavage« […] Il faudrait donc, pour qu’un gouvernement arbitraire fût légitime, qu’à chaque génération le peuple fût le maître de l’admettre ou de le rejeter : mais alors ce gouvernement ne serait plus arbitraire. […] » |
Chapitre 1.5 Qu’il faut toujours remonter à une première convention« […] Un peuple, dit Grotius, peut se donner à un roi. Selon Grotius, un peuple est donc un peuple avant de se donner à un roi. Ce don même est un acte civil ; il suppose une délibération publique. Avant donc que d’examiner l’acte par lequel un peuple élit un roi, il serait bon d’examiner l’acte par lequel un peuple est un peuple ; car cet acte, étant nécessairement antérieur à l’autre, est le vrai fondement de la société. En effet, s’il n’y avait point de convention antérieure, où serait, à moins que l’élection ne fût unanime, l’obligation pour le petit nombre de se soumettre au choix du grand ? et d’où cent qui veulent un maître ont-ils le droit de voter pour dix qui n’en veulent point ? La loi de la pluralité des suffrages est elle-même un établissement de convention et suppose, au moins une fois, l’unanimité. […] » |
Chapitre 1.6 Du pacte social «
[…]
Trouver
une forme d’association qui
défende et protège de toute la force commune la
personne et les biens de chaque associé, et par laquelle
chacun, s’unissant à tous,
n’obéisse pourtant qu’à
lui-même, et reste aussi libre
qu’auparavant. » Tel est le
problème fondamental dont le Contrat social donne la
solution.
[…]
»
Enfin, chacun se donnant à tous ne se donne à personne ; et comme il n’y a pas un associé sur lequel on n’acquière le même droit qu’on lui cède sur soi, on gagne l’équivalent de tout ce qu’on perd, et plus de force pour conserver ce qu’on a. Si donc on écarte du pacte social ce qui n’est pas de son essence, on trouvera qu’il se réduit aux termes suivants : « Chacun de nous met en commun sa personne et toute sa puissance sous la suprême direction de la volonté générale ; et nous recevons encore chaque membre comme partie indivisible du tout. » A l’instant, au lieu de la personne particulière de chaque contractant, cet acte d’association produit un corps moral et collectif, composé d’autant de membres que l’assemblée a de voix, lequel reçoit de ce même acte son unité, son moi commun, sa vie et sa volonté. Cette personne publique, qui se forme ainsi par l’union de toutes les autres, prenait autrefois le nom de cité, et prend maintenant celui de république ou de corps politique, lequel est appelé par ses membres État quand il est passif, souverain quand il est actif, puissance en le comparant à ses semblables. À l’égard des associés, ils prennent collectivement le nom de peuple, et s’appellent en particulier citoyens, comme participant à l’autorité souveraine, et sujets, comme soumis aux lois de l’État. Mais ces termes se confondent souvent et se prennent l’un pour l’autre ; il suffit de les savoir distinguer quand ils sont employés dans toute leur précision. […] » Chapitre
1.9 Du domaine réel |
Chapitre 2.3 Si la volonté générale peut errer « […] Il s’ensuit de ce qui précède que la volonté générale est toujours droite et tend toujours à l’utilité publique : mais il ne s’ensuit pas que les délibérations du peuple aient toujours la même rectitude. On veut toujours son bien, mais on ne le voit pas toujours : jamais on ne corrompt le peuple, mais souvent on le trompe, et c’est alors seulement qu’il paraît vouloir ce qui est mal. Il
y a souvent bien de la différence entre la
volonté de tous et la volonté
générale ; celle-ci ne regarde
qu’à l’intérêt
commun ; l’autre regarde à
l’intérêt privé, et
n’est qu’une somme de volontés
particulières : mais ôtez de ces
mêmes volontés les plus et les moins qui
s’entre-détruisent , reste pour somme des
différences la volonté
générale. Il importe donc, pour avoir bien l’énoncé de la volonté générale, qu’il n’y ait pas de société partielle dans l’État, et que chaque citoyen n’opine que d’après lui (a) ; telle fut l’unique et sublime institution du grand Lycurgue. Que s’il y a des sociétés partielles, il en faut multiplier le nombre et en prévenir l’inégalité, comme firent Solon, Numa, Servius. Ces précautions sont les seules bonnes pour que la volonté générale soit toujours éclairée, et que le peuple ne se trompe point. […] » |
Chapitre 3.10 De l’abus du gouvernement et de sa pente à dégénérer« […] Comme la volonté particulière agit sans cesse contre la volonté générale, ainsi le gouvernement fait un effort continuel contre la souveraineté. Plus cet effort augmente, plus la constitution s’altère ; et comme il n’y a point ici d’autre volonté de corps qui, résistant à celle du prince, fasse équilibre avec elle, il doit arriver tôt ou tard que le prince opprime enfin le souverain et rompe le traité social. C’est là le vice inhérent, et inévitable qui, dès la naissance du corps politique, tend sans relâche à le détruire, de même que la vieillesse et la mort détruisent enfin le corps de l’homme. Il y a deux voies générales par lesquelles un gouvernement dégénère : savoir, quand il se resserre, ou quand l’État se dissout. Le gouvernement se resserre quand il passe du grand nombre au petit, c’est-à-dire de la démocratie à l’aristocratie, et de l’aristocratie à la royauté. C’est là son inclinaison naturelle . S’il rétrogradait du petit nombre au grand, on pourrait dire qu’il se relâche mais ce progrès inverse est impossible. En effet, jamais le gouvernement ne change de forme que quand son ressort usé le laisse trop affaibli pour pouvoir conserver la sienne. Or, s’il se relâchait encore en s’étendant, sa force deviendrait tout à fait nulle, et il subsisterait encore moins. Il faut donc remonter et serrer le ressort à mesure qu’il cède ; autrement l’État qu’il soutient tomberait en ruine. Le cas de la dissolution de l’État peut arriver de deux manières. Premièrement, quand le prince n’administre plus l’État selon les lois, et qu’il usurpe le pouvoir souverain. Alors il se fait un changement remarquable ; c’est que, non pas le gouvernement, mais l’État se resserre ; je veux dire que le grand État se dissout, et qu’il s’en forme un autre dans celui-là, composé seulement des membres du gouvernement, et qui n’est plus rien au reste du peuple que son maître et son tyran. De sorte qu’à l’instant que le gouvernement usurpe la souveraineté, le pacte social est rompu ; et tous les simples citoyens, rentrés de droit dans leur liberté naturelle, sont forcés, mais non pas obligés d’obéir. Le même cas arrive aussi quand les membres du gouvernement usurpent séparément le pouvoir qu’ils ne doivent exercer qu’en corps ; ce qui n’est pas une moindre infraction des lois, et produit encore un plus grand désordre. Alors on a, pour ainsi dire, autant de princes que de magistrats ; et l’État, non moins divisé que le gouvernement, périt ou change de forme. Quand l’État se dissout, l’abus du gouvernement, quel qu’il soit, prend le nom commun d’anarchie. En distinguant, la démocratie dégénère en ochlocratie , l’aristocratie en oligarchie : j’ajouterais que la royauté dégénère en tyrannie, mais ce dernier mot est équivoque et demande explication. […] » |
Chapitre 3.17 De l’institution du gouvernement « […] Sous quelle idée faut-il donc concevoir l’acte par lequel le gouvernement est institué ? Je remarquerai d’abord que cet acte est complexe, ou composé de deux autres, savoir : l’établissement de la loi et l’exécution de la loi. Par le premier, le souverain statue qu’il y aura un corps de gouvernement établi sous telle ou telle forme ; et il est clair que cet acte est une loi. Par le second, le peuple nomme les chefs qui seront chargés du gouvernement établi. Or cette nomination, étant un acte particulier, n’est pas une seconde loi, mais seulement une suite de la première et une fonction du gouvernement. La difficulté est d’entendre comment on peut avoir un acte de gouvernement avant que le gouvernement existe, et comment le peuple, qui n’est que souverain ou sujet, peut devenir prince ou magistrat dans certaines circonstances. C’est encore ici que se découvre une de ces étonnantes propriétés du corps politique, par lesquelles il concilie des opérations contradictoires en apparence ; car celle-ci se fait par une conversion subite de la souveraineté en démocratie, en sorte que, sans aucun changement sensible, et seulement par une nouvelle relation de tous à tous, les citoyens, devenus magistrats, passent des actes généraux aux actes particuliers, et de la loi à l’exécution. Ce changement de relation n’est point une subtilité de spéculation sans exemple dans la pratique : il a lieu tous les jours dans le parlement d’Angleterre, où la chambre basse, en certaines occasions, se tourne en grand comité, pour mieux discuter les affaires, et devient ainsi simple commission, de cour souveraine qu’elle était l’instant précédent ; en telle sorte qu’elle se fait ensuite rapport à elle-même, comme chambre des communes, de ce qu’elle vient de régler en grand comité, et délibère de nouveau sous un titre de ce qu’elle a déjà résolu sous un autre. Tel est l’avantage propre au gouvernement démocratique, de pouvoir être établi dans le fait par un simple acte de la volonté générale. Après quoi ce gouvernement provisionnel reste en possession, si telle est la forme adoptée, ou établit au nom du souverain le gouvernement prescrit par la loi ; et tout se trouve ainsi dans la règle. Il n’est pas possible d’instituer le gouvernement d’aucune autre manière légitime et sans renoncer aux principes ci-devant établis. […] » |
Livre IV Chapitre 4.1
Que la
volonté générale est indestructible |
Chapitre 4.2
Des suffrages Si donc, lors du pacte social, il s’y trouve des opposants, leur opposition n’invalide pas le contrat, elle empêche seulement qu’ils n’y soient compris : ce sont des étrangers parmi les citoyens. Quand l’État est institué, le consentement est dans la résidence ; habiter le territoire, c’est se soumettre à la souveraineté. Hors ce contrat primitif, la voix du plus grand nombre oblige toujours tous les autres ; c’est une suite du contrat même. Mais on demande comment un homme peut être libre et forcé de se conformer à des volontés qui ne sont pas les siennes. Comment les opposants sont-ils libres et soumis à des lois auxquelles ils n’ont pas consenti ? Je réponds que la question est mal posée. Le citoyen consent à toutes les lois, même à celles qu’on passe malgré lui, et même à celles qui le punissent quand il ose en violer quelqu’une. La volonté constante de tous les membres de l’État est la volonté générale : c’est par elle qu’ils sont citoyens et libres . Quand on propose une loi dans une assemblée du peuple, ce qu’on leur demande n’est pas précisément s’ils approuvent la proposition ou s’ils la rejettent, mais si elle est conforme ou non à la volonté générale, qui est la leur : chacun en donnant son suffrage dit son avis là-dessus ; et du calcul des voix se tire la déclaration de la volonté générale. Quand donc l’avis contraire au mien l’emporte, cela ne prouve autre chose sinon que je m’étais trompé, et que ce que j’estimais être la volonté générale ne l’était pas. Si mon avis particulier l’eût emporté, J’aurais fait autre chose que ce que j’avais voulu ; c’est alors que je n’aurais pas été libre. Ceci suppose, il est vrai, que tous les caractères de la volonté générale sont encore dans la pluralité ; quand ils cessent d’y être, quelque parti qu’on prenne, il n’y a plus de liberté. En montrant ci-devant comme on substituait des volontés particulières à la volonté générale dans les délibérations publiques, j’ai suffisamment indiqué les moyens praticables de prévenir cet abus ; j’en parlerai encore ci-après. À l’égard du nombre proportionnel des suffrages pour déclarer cette volonté, j’ai aussi donné les principes sur lesquels on peut le déterminer. La différence d’une seule voix rompt l’égalité ; un seul opposant rompt l’unanimité : mais entre l’unanimité et l’égalité il y a plusieurs partages inégaux, à chacun desquels on peut fixer ce nombre selon l’état et les besoins du corps politique. Deux maximes générales peuvent servir à régler ces rapports : l’une que, plus les délibérations sont importantes et graves, plus l’avis qui l’emporte doit approcher de l’unanimité ; l’autre, que, plus l’affaire agitée exige de célérité, plus on doit resserrer la différence prescrite dans le partage des avis : dans les délibérations qu’il faut terminer sur-le-champ, l’excédant d’une seule voix doit suffire. La première de ces maximes paraît plus convenable aux lois, et la seconde aux affaires. Quoi qu’il en soit, c’est sur leur combinaison que s’établissent les meilleurs rapports qu’on peut donner à la pluralité pour prononcer. […] » |
♦ technique de l'arrosoir ♦ cahiers de doléances permanent et temps réel =
♦ mesurer officiellement la distinction entre "vote pour" et "vote contre", cette mesure étant assortie d'une contrainte proportionnelle pour les élus |